Des changements dans la main-d’œuvre pour combler les nouveaux besoins des systèmes de santé

Le 17 novembre 2022 — Au début de la pandémie de COVID-19, les systèmes de santé se sont rapidement adaptés pour répondre aux besoins nouveaux et urgents de la population. La surveillance et la gestion de la main-d’œuvre de la santé se sont avérées essentielles pour composer avec cette pression sans précédent sur nos systèmes de santé. Au Canada, la main-d’œuvre de la santé demeurera une priorité, car les systèmes de soins devront s’attaquer à la liste croissante d’interventions non urgentes reportées.

Je crois que nous devons favoriser une culture et des relations saines au travail, et nous montrer souples en essayant de nouveaux modèles de soins ou en trouvant des solutions uniques et créatives à nos problèmes. Il ne faut pas craindre l’audace. Nous devons aussi nous assurer de disposer de données adéquates. Parce que le Canada est si morcelé et diversifié, il est parfois difficile d’accéder à des données comparables. Les gens qui relèvent le défi de fournir ces données en établissant des normes nous aident à nous améliorer. — Dr Christian Finley, chirurgien thoracique; expert en chef au Partenariat canadien contre le cancer; responsable du dépistage du cancer du poumon en Ontario

Répercussions

Changements dans les services offerts par les médecins

Les tendances dans l’utilisation des services des médecins peuvent donner une idée des répercussions de la COVID-19 sur nos systèmes de santé. Le volume de services dispensés a baissé de 7,9 % de 2019-2020 à 2020-2021. À titre de comparaison, il avait augmenté de 1,2 % de 2018-2019 à 2019-2020. La baisse la plus importante est survenue entre avril et juin 2020, pendant la première vague de la pandémie de COVID-19 : 26 % moins de services ont été fournis que durant la même période l’année précédente.

Bien que l’adaptation aux soins virtuelsRéférence 1 pendant la pandémie ait été rapide, l’incidence sur la prestation des services offerts par les médecins et la capacité de ces derniers à adopter ce mode de prestation ont varié d’un groupe de spécialistes à l’autre. En 2020-2021, les volumes de services de médecine familiale et de psychiatrie fournis ont respectivement baissé de 7 % et de 2 %, tandis que les volumes de services de chirurgie orthopédique et d’ophtalmologie ont quant à eux diminué de 11 % et de 12 %. Une transition vers les soins virtuels a été constatée, mais d’autres travaux devront être entrepris pour mesurer les préférences des patients et des dispensateurs, ainsi que la qualité et l’efficacité des soins.

La comparaison avec les données trimestrielles de l’année précédente indique une chute initiale du volume de services offerts par les médecins suivie d’une remontée stable au cours du reste de l’année. En général, le volume de services est pratiquement revenu à son niveau prépandémique au quatrième trimestre (janvier à mars) de 2020-2021. Les médecins de famille ont fourni 21 % moins de services durant le premier trimestre, mais cette baisse est revenue à seulement 1 % au cours du quatrième trimestre. La reprise des activités s’est passée différemment selon les spécialités : par rapport à l’année précédente, les services ont diminué de 10 % en psychiatrie au cours du premier trimestre, mais augmenté de 5 % au cours du quatrième; les ophtalmologues ont quant à eux fourni 48 % moins de services pendant le premier trimestre, mais 13 % plus de services au quatrième trimestre.

Ces tendances pourraient avoir un effet sur la reprise dans les systèmes de santé. Le dernier rapport de l’ICIS sur les temps d’attente pour les interventions prioritairesRéférence 2 démontre que même si le nombre de chirurgies exécutées a diminué en 2021, les Canadiens ont attendu plus longtemps qu’en 2019. Le changement marqué dans le volume de services d’orthopédie fournis (-39 % au premier trimestre et 6,1 % au quatrième) nécessite une surveillance, parce qu’il pourrait avoir des répercussions sur les temps d’attente pour des interventions comme les arthroplasties de la hanche et du genou. Dans le même ordre d’idée, il sera important d’évaluer si la diminution dans le volume de services en pédiatrie (-25 % au premier trimestre et -5,5 % au quatrième) aura des conséquences sur les résultats pour les jeunes patients.

Pourcentage de variation dans le volume de services fournis par les médecins, selon la spécialité et le trimestre, 2020-2021

Ce graphique est decrit ci-dessous
Texte de remplacement pour le graphique
Spécialité T1 T2 T3 T4
 Médecine familiale  -20,6  -3,8  -2,7  -1,2
 Psychiatrie  -9,6  -3,1  -0,2  5,4
 Pédiatrie  -25,5  -6,7  -8,2  -5,5
 Orthopédie  -38,9  -5,7  -3,6  6,1
 Ophtalmologie  -48,1  -4,1  -5,8  14,0
 Ensemble des médecins  -25,8  -4,5  -3,0  2,2

Source
Base de données nationale sur les médecins, Institut canadien d’information sur la santé.

Adaptation des systèmes de santé

Efforts de recrutement et de rétention

Depuis le début de la pandémie, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont annoncé des initiatives de financement de plusieurs millions de dollars pour recruter des travailleurs de la santé et les garder en poste. Ces mesures visent à améliorer les conditions de travail pour les travailleurs de la santé actuels et à créer des occasions d’intégration des étudiants, des nouveaux diplômés et des travailleurs formés à l’étranger. Elles ont ainsi pour objectif d’assurer un effectif suffisant — à court et à long terme — pour répondre aux besoins des systèmes de santé. Le gouvernement fédéral a par exemple créé et financé un programme de formation accélérée gratuite pour 4 000 préposés aux services de soutien à la personne, financé des améliorations à la formation du personnel et soutenu la bonification des mesures de prévention des infections en soins de longue duréeRéférence 3.

À l’échelle provinciale ou territoriale, bon nombre de gouvernements ont offert aux travailleurs du secteur de la santé des primes en argent, des hausses du salaire horaire ou la rémunération des congés de maladie, et des services de garde d’enfantReference 3. De nombreux organismes de réglementation ont aussi appelé les dispensateurs de soins de santé retraités ou non actifs à réintégrer temporairement la main-d’œuvre afin de contribuer à la lutte contre la COVID-19. Parmi d’autres, ces stratégies de recrutement et de rétention visent non seulement à offrir des incitatifs financiers aux travailleurs, mais aussi à les aider à maintenir un meilleur équilibre travail-vie personnelle et à optimiser les modèles de soins pour l’avenir.

Augmenter les effectifs de professionnels de la santé formés à l’étranger

Les professionnels de la santé formés à l’étranger constituent depuis longtemps une grande proportion de la main-d’œuvre de la santé au Canada. En 2021, environ le quart des médecins (26,2 %) avait été formé dans un autre pays. Les physiothérapeutes et les pharmaciens sont aussi largement formés ailleurs (22 % et 34 % respectivement). À titre de comparaison, les ergothérapeutes et les membres du personnel infirmier réglementé formés à l’étranger sont moins nombreux (6 % et 9 % respectivement).

La proportion de la main-d’œuvre de la santé formée à l’étranger varie aussi d’une province et d’un territoire à l’autre. Par exemple, les pharmaciens formés dans un autre pays représentaient une vaste proportion des effectifs de l’Ontario et de l’Alberta en 2021 (48 % et 34 % respectivement), mais moins de 6 % de l’effectif dans les provinces de l’Atlantique. Des tendances semblables sont observées dans d’autres professions. Par exemple, l’Ontario et la Colombie-Britannique comptent davantage sur les ergothérapeutes et physiothérapeutes formés à l’étranger que le Québec et le Nouveau-Brunswick.

Lieu d’obtention du diplôme de certains professionnels de la santé, provinces et territoires pour lesquels des données sont disponibles, 2017 et 2021

This graph is described below
Texte de remplacement pour le graphique
Professionnels de la santé Année Lieu d’obtention du diplôme :
Canada
Lieu d’obtention du diplôme :
étranger
Ergothérapeutes 2017 93 % 7 %
  2021 94 % 6 %
Pharmaciens 2017 68 % 32 %
  2021 66 % 34 %
Médecins 2017 73 % 27 %
  2021 74 % 26 %
Physiothérapeutes 2017 83 % 17 %
  2021 78 % 22 %
Personnel infirmier réglementé 2017 92 % 8 %
  2021 91 % 9 %

Remarque
Exclut les professionnels dont le pays d’obtention du diplôme est inconnu.

Sources
Base de données sur la main-d’œuvre de la santé, Institut canadien d’information sur la santé
Base de données médicales Scott’s, Institut canadien d’information sur la santé, données brutes fournies par iMD (© 2022 iMD Health Global Corp.)

Certaines études indiquent que le Canada compte probablement un nombre important de travailleurs de la santé formés à l’étranger, mais qui ne détiennent pas de permis d’exerciceRéférence 4. Durant la pandémie, les gouvernements ont multiplié les efforts pour mettre à profit les capacités de ce groupe de personnesRéférence 3. Le gouvernement fédéral a annoncé le financement de programmes visant à aider les infirmières formées à l’étranger à obtenir leur permis d’exercice et à intégrer l’effectif. De plus, depuis la fin de 2020, plusieurs provinces (l’Île-du-Prince-Édouard, l’Ontario et le Manitoba) ont annoncé des changements pour éliminer les obstacles empêchant certains professionnels de la santé d’entrer dans la main-d’œuvre en assouplissant les exigences d’inscription et en créant des programmes d’intégration.

Le maintien des niveaux adéquats de dotation en personnel requiert une surveillance et une planification continuelles, particulièrement quand on tient compte des possibles incidences à long terme de la pandémie de COVID-19 sur la main-d’œuvre et la population. Il est essentiel de disposer de données normalisées à l’échelle pancanadienne pour garantir l’exactitude de la surveillance. C’est pourquoi l’ICIS continuera d’améliorer ses normes, de combler les lacunes en matière de données et de travailler avec ses partenaires clés.

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