Le savoir-vivre en salle d’opération

20 min | Publié le 18 février 2025

Dans les salles d’opération, les équipes médicales travaillent sous une pression extrême pour sauver des vies. Et toute cette pression peut créer un milieu de travail toxique. Selon des études, de nombreux membres du personnel et résidents en chirurgie se disent victimes d’incivilités — des collègues leur font des commentaires impolis et humiliants, les ignorent ou ne connaissent parfois même pas leur nom. La Dre Carol-Anne Moulton, du Réseau universitaire de santé, est investie d’une nouvelle mission : changer la culture dans les salles d’opération d’un des plus grands hôpitaux du Canada. L’objectif? Trouver des façons de favoriser la civilité et la gentillesse afin de rendre le personnel plus heureux et les soins plus sécuritaires pour les patients.

Voir un exemple d’exercice du programme de la Dre Moulton.

Cet épisode est disponible en anglais seulement.

Transcription

Avis Favaro

Dans les salles d’opération, les équipes médicales travaillent à sauver des vies, parfois sous une pression extrême. Toutefois, des études démontrent que plus de la moitié des infirmières, des assistants et des médecins interrogés ont fait l’objet de comportements irrespectueux allant de la grossièreté au mépris. La chirurgienne canadienne Carol-Anne Moulton a constaté ce manque de savoir-vivre lorsqu’elle dirigeait des salles d’opération.

Carol-Anne Moulton

Des infirmières rentraient chez elles en pleurant parce qu’elles avaient l’impression que leur travail avait été critiqué ou parce qu’elles se sentaient complètement isolées, se demandant : « Je travaille ici depuis 10 ans, pourquoi un tel ou une telle ne sait pas encore comment je m’appelle? »

Avis Favaro

Ces études indiquent également que ces comportements peuvent miner le moral du personnel et compromettre la sécurité des patients, car ils sont liés à une augmentation des blessures accidentelles en salle d’opération et même des infections postopératoires.

Dans cet épisode, nous en apprendrons davantage sur la nouvelle mission médicale de la Dre Moulton : rétablir le savoir-vivre en salle d’opération. Nous verrons comment son équipe et elle comptent s’y prendre, en commençant par les bonnets de chirurgie, les listes d’équipe informatisées et les devinettes. Vous avez bien entendu. Il s’agit là des premières étapes qui, espère-t-elle, contribueront à améliorer l’ambiance et l’esprit d’équipe dans les salles d’opération.

Carol-Anne Moulton

À terme, j’espère créer un mouvement qui aura des effets dans le monde entier.

Avis Favaro

Je suis Avis Favaro, et je vous souhaite la bienvenue au balado de l’Institut canadien d’information sur la santé.

Chaque année, l’ICIS publie des rapports sur l’état de la main-d’œuvre de la santé au Canada ainsi que sur les pressions et les pénuries auxquelles le système doit faire face. Cet épisode porte sur la campagne menée par une médecin pour rendre les salles d’opération plus conviviales pour le personnel et plus sécuritaires pour les patients.

De tous les milieux de travail, la salle d’opération est l’un de ceux où le personnel est le moins visible. Sous leur sarrau et derrière leur masque, les infirmières, les médecins et les assistants se font plus souvent interpeller par leur rôle que par leur nom.

Pam Hubley, infirmière pendant 30 ans, se souvient très nettement de s’être sentie invisible.

Pam Hubley

Beaucoup de chirurgiens venaient pour soigner leurs patients, de toute évidence, et pour discuter avec les familles, mais il a fallu 2 ans pour qu’un chirurgien m’appelle par mon nom.

Avis Favaro

Ce petit geste de savoir-vivre, le simple fait de prononcer son nom, a fait toute la différence.

Pam Hubley

Le moment où une personne m’a reconnue — Pam… oui, enfin! Ç’a été merveilleux, car j’ai senti qu’on me considérait comme une personne, comme membre à part entière de l’équipe.

Avis Favaro

Ou comme le Dr Carlos Ibarra, un anesthésiste.

Combien de fois vous a-t-on appelé « Hé! toi » dans une salle d’opération?

Carlos Ibarra

Combien de fois depuis 20 ans ou la semaine dernière? Le syndrome « Hé! toi » est très répandu.

Avis Favaro

Il nous parle des nombreux efforts qu’il a déployés pour tisser des liens avec ses collègues du Réseau universitaire de santé, à Toronto, où un nouveau projet dont vous entendrez bientôt parler est en cours.

Il dit aussi que les hôpitaux ne facilitent pas tous le savoir-vivre en chirurgie. Ajoutez à cela le stress et le taux élevé de rotation du personnel, qui compliquent encore plus la communication.

Lorsque vos collègues ne connaissant pas votre nom, la peur finit par s’installer.

Carlos Ibarra

Oui.

Avis Favaro

Et la peur mène-t-elle à des erreurs?

Carlos Ibarra

Oui assurément, la peur mène à des erreurs. La peur et la fatigue. Voilà pourquoi il faut prêter attention aux petits détails. Avec le savoir-vivre, et même plus que le savoir-vivre, on crée un environnement chaleureux et amical où personne n’a peur.

Avis Favaro

Selon la Dre Carol-Anne Moulton, connaître le nom de ses collègues n’a jamais été très important dans le milieu de la chirurgie.

Carol-Anne Moulton

Nous discutons surtout de sujets techniques. Nous parlons beaucoup — nous célébrons les réussites chirurgicales. Mais la culture ou nos rapports les uns aux autres, nous n’y accordons pas vraiment d’attention.

Avis Favaro

La Dre Moulton est une spécialiste des chirurgies pancréatiques et hépatiques au Réseau universitaire de santé. Elle est aussi chercheure; elle étudie la culture en salle d’opération et ce qui se passe en coulisse, un sujet qui l’intéresse depuis plus d’une décennie en raison des expériences qu’elle a vécues.

Parlez-moi de l’époque où vous entriez dans une salle d’opération…

Carol-Anne Moulton

Oui.

Avis Favaro

… sans nécessairement savoir avec qui vous alliez travailler.

Carol-Anne Moulton

Exact.

Avis Favaro

Que ressentiez-vous?

Carol-Anne Moulton

Je crois que je me sentais un peu… Lorsque vous me demandez ce que je ressentais, en fait, on se sent comme si c’était normal de ne pas connaître les membres de l’équipe.

Avis Favaro

Et pourtant, vous faites ensemble une intervention sur le corps d’une personne.

Carol-Anne Moulton

On connaît les rôles : ça c’est l’infirmière en service externe, ça c’est l’infirmière en service interne, ça c’est l’anesthésiste. Et dans certains cas, cela m’a été utile. J’ai commencé à m’en rendre compte. Je devrais connaître son nom, pourquoi je ne le connais pas? Pourquoi est-ce un problème?

Et puis lors de nos recherches, nous avons réalisé qu’il était courant de ne pas connaître le nom de nos collègues de travail.

Avis Favaro

Est-ce qu’il vous arrivait de quitter une salle d’opération mal à l’aise de ne pas connaître le nom d’une personne et de l’avoir appelée « Hé! toi »?

Carol-Anne Moulton

Oui. Je n’interpellais pas souvent les gens comme ça. J’avais une autre façon de gérer ce genre de situation. J’attendais que la personne me regarde et puis… ou alors je demandais discrètement au résident ou au stagiaire « Qui est-ce? » ou « Comment s’appelle l’anesthésiste? ». Il faut essayer de comprendre en équipe. Et nous faisons cela souvent. Qui est-ce? Comment s’appelle l’infirmière en service interne?

Avis Favaro

Ce n’est pas idéal.

Carol-Anne Moulton

Ce n’est pas idéal du tout.

Avis Favaro

En effet. Après tout, vous êtes dans une salle d’opération, et —

Carol-Anne Moulton

Exact. Et parfois, nous demandions tout haut : « Peux-tu aller chercher ceci ou cela? » Ou je profitais du fait que l’infirmière en service interne me regardait, au lieu de le demander à l’infirmière en service externe qui se trouve là-bas dans le coin : « Andrea, peux-tu me donner l’agrafeuse? »

Avis Favaro

Avez-vous atteint un point où vous avez commencé à vous sentir mal à l’aise et à vous dire que vous deviez corriger cela?

Carol-Anne Moulton

Bien des infirmières disaient qu’elles rentraient chez elles en pleurant parce qu’elles avaient l’impression que leur travail avait été critiqué ou parce qu’elles se sentaient complètement isolées, se demandant : « Je travaille ici depuis 10 ans, pourquoi un tel ou une telle ne sait pas encore comment je m’appelle? »

Elles nous confiaient ça à nous, les chercheurs, et je me suis dit : « En effet, pourquoi ne connaissons-nous pas leur nom? C’est ridicule! » Je sais que j’ai aussi mes torts, car comme chirurgienne, j’ai fait partie du même système.

Avis Favaro

Selon certaines études, le manque de communication est l’une des principales causes d’erreurs médicales. Les données de l’ICIS indiquent qu’un patient hospitalisé sur 17 subit des préjudices, les principaux étant les infections post-chirurgicales et les hémorragies à la suite d’une opération.

La Dre Moulton a accumulé des tonnes de données sur la façon dont les membres des équipes médicales communiquent et la façon dont les chirurgiens dirigent les équipes. Elle est déterminée à améliorer le savoir-vivre et la compréhension du rendement dans les salles d’opération.

Est-ce un sentiment de culpabilité qui vous a motivée à faire cette recherche?

Carol-Anne Moulton

Ce n’est pas de la culpabilité, mais simplement la volonté de reconnaître que nous pourrions faire mieux, être mieux ensemble et mieux fonctionner en tant qu’équipe. Nous communiquerions autrement si nous nous respections les uns les autres et si nous nous connaissions. Et nous sommes tellement occupés que la solution ne peut pas toujours être d’organiser une fête ou un souper. Ça ne fonctionne pas comme ça parce que le nombre de personnes concernées est beaucoup trop grand.

En tant que directrice médicale, et en tant que chercheure dans ce domaine, j’ai commencé à comprendre comment nous pouvons décharger les personnes de cette responsabilité et régler le problème à l’échelle du système. Personne ne devrait se sentir mal de ne pas connaître le nom des autres membres de son équipe.

Avis Favaro

Son hôpital, le Réseau universitaire de santé, à Toronto, est du même avis. En 2024, la Dre Moulton est devenue la première chirurgienne au monde à porter le titre de responsable connaissance et culture en chirurgie. En d’autres termes, son équipe et elle étudient et mettent en œuvre des outils pour remodeler les communications dans la salle d’opération. On pourrait appeler cela les règles de conduite médicale, mais le but est d’en permettre la mise en œuvre dans les hôpitaux afin d’améliorer le savoir-vivre et la fluidité du travail dans ces environnements très stressants.

Carol-Anne Moulton

Il faut des chirurgiens, des infirmières, un personnel plus heureux.

Épanouis. Des personnes qui comptent et qui savent que leur travail compte. C’est ce que tout le monde veut. Un sentiment d’appartenance. Nous savons que c’est important.

Avis Favaro

Nous faisons face à de nombreux problèmes de pénurie de personnel.

Carol-Anne Moulton

M-hm.

Avis Favaro

Est-ce vraiment le moment de parler de savoir-vivre?

Carol-Anne Moulton

Je pense que c’est le moment idéal, oui. Parce que je crois que le taux d’attrition est très élevé, surtout en raison du stress. Les pénuries et les retards causés par la pandémie sont une grande source de stress pour les équipes chirurgicales, en particulier pour les chirurgiens. Et le fait que des personnes ne veuillent pas venir travailler ou ne veuillent pas être ici parce qu’elles sont traitées de manière irrespectueuse n’aide pas du tout.

Je pense donc que le moment est bien choisi. Je crois qu’il est temps de valoriser ce que nous faisons et… Les gens devraient trouver un sens à leur travail, non?

Avis Favaro

Nous sommes maintenant à l’intérieur du bloc opératoire du Réseau universitaire de santé. La Dre Moulton et son équipe en sont aux 6 premiers mois de leur nouveau mandat. Leur projet en cours, le Transform OR Project, vise à transformer la salle d’opération. Voici 3 exemples des mesures qu’elle et son équipe mettent en œuvre.

Carol-Anne Moulton

C’est par ici que tout le monde passe pour entrer dans la salle d’opération. C’est donc ici, à la vue de tous. Et de nombreux patients entrent et sortent par ici.

Avis Favaro

La première mesure est un grand écran accroché en hauteur sur un mur, à l’intérieur du bloc opératoire. Il affiche les visages des membres du personnel masqués, accompagnés de la question suivante : « Qui est-ce? »

Sur l’image suivante, le masque est enlevé. La personne en question est Marcus George, chef des services de soutien périopératoires. Son visage s’affiche ainsi que des renseignements à son sujet. Nous en publierons un exemple sur le site Web de l’ICIS.

Les gens savent que vous aimez les Maple Leafs.

Marcus George

Malheureusement. C’était quand ils jouaient bien. Maintenant, je ne suis plus trop certain.

Avis Favaro

Selon lui, ce jeu de devinette a atténué la pression qu’il ressentait depuis longtemps de ne pas se rappeler les noms des membres de l’équipe chirurgicale.

Marcus George

Nous travaillons avec tellement de différentes personnes et bien souvent, c’est embarrassant de ne pas connaître leur nom. Je vous rencontre pour la première fois, vous vous présentez, et le nom est oublié quelques jours après.

Avis Favaro

Quant à Marcus, il a aussi appris quelque chose de nouveau sur ses collègues.

Marcus George

Nous avions un autre assistant, David. J’ai travaillé avec lui pendant de nombreuses années et je ne savais pas qu’il avait des oiseaux. Oui, et ce qu’il aime par-dessus tout, c’est de passer du temps avec ses oiseaux. J’ignorais cela même si j’ai travaillé avec lui pendant 15 ans.

La mesure a également contribué à améliorer la sécurité des patients, par exemple, ou simplement à maintenir le calme dans les salles d’opération. La concentration dans les salles d’opération est tellement intense. Il ne faut pas que d’autres petits problèmes viennent nuire aux soins des patients.

L’idée de la Dre Moulton d’encourager le respect mutuel et le volet équipe qui vient avec ont en fait rendu l’équipe plus efficace.

Avis Favaro

Prochaine initiative : des bonnets chirurgicaux sur lesquels sont inscrits le nom et le rôle de chaque personne.

Carol-Anne Moulton

C’est un rappel visuel du nom de la personne. Par exemple, si j’ai besoin d’attirer l’attention de l’anesthésiste, mais que je ne connais pas son nom, je n’ai maintenant qu’à regarder sur le côté du bonnet.

Avis Favaro

L’anesthésiste Carlos Ibarra porte fièrement son bonnet.

Le fait que votre nom soit inscrit sur votre bonnet à la vue de tous a-t-il déjà accéléré la prise de décisions ou la prestation des soins à un patient?

Carlos Ibarra

Je constate l’effet tous les jours lorsque des gens que je connais peu m’interpellent par mon prénom. Pour moi, cela crée immédiatement une tout autre ambiance.

Avis Favaro

Combien avez-vous de bonnets avec les noms et combien vous en reste-t-il à faire?

Carol-Anne Moulton

Il nous en reste beaucoup à faire. Les gens ont besoin de beaucoup de bonnets parce qu’il faut les laver. Je pense que le premier lot comprenait 150 bonnets, et nous venons de commander 100 bonnets supplémentaires.

Avis Favaro

Donc les choses commencent seulement à s’accélérer?

Carol-Anne Moulton

En effet, mais nous envisageons aussi d’avoir notre propre machine, car il y a des infirmières au bloc opératoire qui fabriquent des bonnets et les vendent à bon prix. Mais vous pouvez simplement écrire votre nom sur du ruban-cache et coller le ruban sur votre bonnet. C’est ce que font certains. L’idée que nous voulons faire circuler est simplement d’avoir son nom inscrit sur le bonnet.

Avis Favaro

Le prochain outil de la Dre Moulton est en préparation.

Carol-Anne Moulton

Voici les salles. Sur le tableau blanc là-bas, sur le mur du fond, vous pouvez voir le nom du chirurgien et des infirmières d’anesthésie.

Avis Favaro

Oui.

L’outil remplacera le tableau blanc qui se trouve sur le mur de la plupart des salles d’opération. C’est sur ce tableau que les membres de l’équipe sont censés inscrire leur nom et leur rôle au marqueur effaçable.

Carol-Anne Moulton

À l’heure actuelle, c’est là que doit être indiqué le nom de chaque personne présente dans la salle d’opération. En fait, ce sont les infirmières, généralement l’infirmière en service externe, qui s’en occupe.

Avis Favaro

Est-ce suffisant? C’est la façon habituelle de procéder, n’est-ce pas?

Carol-Anne Moulton

En fait, vous remarquerez qu’il y a une salle ici et qu’il n’y a pas de noms là-haut. Alors non, ce n’est pas suffisant. Le tableau n’est pas rempli systématiquement. On compte sur les gens pour le remplir, mais les gens oublient. En salle d’opération, il m’est souvent arrivé de constater que le tableau n’était pas à jour et que les noms des membres de l’équipe de la veille y étaient inscrits. Cette initiative ne fait pas partie d’un système. Premièrement, il faut rappeler aux gens de remplir le tableau.

Deuxièmement, il y a habituellement 3 infirmières dans la salle, et le tableau indique le nom de 3 infirmières. Mais je ne sais pas qui est qui. Par exemple, je sais que celle-ci s’appelle Jennifer, mais laquelle est Sally et laquelle est Andrea? Je dois deviner, n’est-ce pas?

Avis Favaro

Son équipe souhaite éliminer cette incertitude et remplacer le tableau par un système de listes informatisé et automatisé. Le résultat ressemblera aux tableaux indiquant la formation des équipes avant les matchs à la télévision. 

Carol-Anne Moulton

Il ne s’agit que d’une initiative de plus pour se rappeler les noms. Donc, ce système retire aux personnes la responsabilité de devoir connaître le nom de chacun de leurs collègues. Le système informatique contient déjà toutes les données sur les personnes présentes dans la salle. Nous pouvons ainsi disposer d’un répertoire de ces noms, qui montre aussi les rôles de chaque membre de l’équipe et leur visage.

Avis Favaro

Une photo.

Carol-Anne Moulton

Oui, une photo.

Avis Favaro

Ainsi, lorsqu’une personne entre dans la salle, vous pouvez voir…

Carol-Anne Moulton

Je peux voir automatiquement qui est dans la salle, qui sera l’infirmière en service interne ou en service externe. Le nom des stagiaires peut également y être indiqué. L’ordinateur peut afficher toutes les données que vous voulez.

Avis Favaro

Vous avez fait une comparaison avec une formation d’équipe de football ou de hockey. Ce genre de système existe-t-il ailleurs dans le monde?

Carol-Anne Moulton

Pas que je sache.

Avis Favaro

Donc il entrerait en fonction en 2025?

Carol-Anne Moulton

Je pense que oui.

Avis Favaro

La Dre Moulton et son équipe ont de nombreux autres projets et études en cours. Plusieurs la ramènent au point de départ de sa mission en tant que chirurgienne. En effet, ses recherches indiquent que les chirurgiens peuvent eux-mêmes favoriser le savoir-vivre en salle d’opération.

Carol-Anne Moulton

Au cours de la formation, on adopte peu à peu une identité de chirurgien. On admire certaines personnes, des chirurgiens courageux qui s’occupent de cas complexes et qui ne laissent jamais paraître leur vulnérabilité. Quand on devient chirurgien à son tour, on a l’impression de devoir faire la même chose. Pour exceller en chirurgie, c’est ce qu’il faut être.

Le problème, c’est qu’il ne s’agit que du devant de la scène. De l’extérieur, on donne l’impression de maîtriser la situation. Les chirurgiens — dont moi-même — reconnaissent que leur métier comprend une scène, mais aussi des coulisses. Nous sommes des acteurs dans la salle d’opération. On peut créer une ambiance peu respectueuse où certains se sentent dénigrés et réduits au silence. C’est au chirurgien d’en être conscient, ce qui est parfois difficile.

Avis Favaro

Comme si vous souleviez la cape d’invisibilité.

Carol-Anne Moulton

Exactement. Dans mon exposé intitulé « Beyond Cognition: Peeking Behind the Curtain », c’est ce que nous faisons. Nous discutons de choses très importantes, mais dont personne ne parle.

Avis Favaro

Vous vous souvenez de Pam Hubley, qui s’est réjouie lorsqu’un chirurgien l’a appelée par son nom pour la première fois? Elle occupe aujourd’hui un poste de vice-présidente à l’hôpital. Selon elle, l’effet de ces premières initiatives sur la culture au sein des équipes chirurgicales commence à se faire sentir.

Pam Hubley

Aujourd’hui, nous voulons que chaque personne s’exprime, qu’elle soit fière de ce qu’elle fait, qu’il y ait un dialogue. Nous devons vraiment améliorer notre communication.

Avis Favaro

Dans quel but?

Pam Hubley

D’abord, pour la sécurité des patients. Ensuite, pour la cohésion et la compréhension au sein des équipes, et pour l’épanouissement de leurs membres.

Avis Favaro

Les mesures qui commencent à être mises en place ont-elles un effet sur la sécurité des patients? Et comment le savez-vous?

Pam Hubley

Oui. Je pense que nous voyons un changement dans la culture parce que nous invitons directement les gens à s’exprimer. C’est donc plus cohésif à mon avis, ce qui est très important. Cela permet d’assurer la sécurité des patients. Cela améliore la communication, donc la qualité des soins.

Avis Favaro

La Dre Moulton y voit un signe encourageant où les hôpitaux peuvent contribuer à la mise en place de systèmes favorisant une collaboration et un travail d’équipe efficaces.

Qu’espérez-vous?

Carol-Anne Moulton

À terme, j’espère créer un mouvement qui aura des effets dans le monde entier. Je crois que c’est possible, et je crois — je ne suis pas douée pour les médias sociaux, et c’est probablement l’une des raisons pour lesquelles nous avons besoin de personnes comme vous — que la plupart des gens sont concernés, je veux dire dans le monde entier. C’est un problème qui se pose partout sur la planète.

Avis Favaro

Les salles d’opération ne sont pas des usines. Ce sont des équipes vivantes qui travaillent à sauver des vies. La qualité de leur vie professionnelle est donc importante pour éviter la perte de personnel et améliorer la satisfaction au travail. Les données de l’équipe de la Dre Moulton seront disponibles dans quelques mois.

Merci beaucoup d’avoir été à l’écoute. N’oubliez pas de visiter le site Web de l’ICIS, où vous trouverez beaucoup plus d’information sur le système de santé canadien, au i-c-i-s point c-a. Et ne manquez pas de vous abonner au Balado d’information sur la santé au Canada et écoutez-le sur la plateforme de votre choix.

Ici Avis Favaro. À la prochaine!

Comment citer ce contenu :

Institut canadien d’information sur la santé. Le savoir-vivre en salle d’opération. Consulté le 25 avril 2025.